GALERIE ZLOTOWSKI
France | Stand 09
Le Salon du Dessin, grand rendez-vous des amateurs d'arts graphiques, ne pourra avoir lieu cette année. Mais, en attendant l'édition 2021, le marché du dessin poursuit son cours malgré la crise. Découvrez dès à présent sur le site de la galerie Zlotowski un dessin puriste de Le Corbusier exécuté en 1932.
Puriste ? Vous avez dit puriste ? Cet adjectif correspond au style artistique lancé par Amédée Ozenfant (1886-1966) et Charles-Édouard Jeanneret dit Le Corbusier au sortir de la Première Guerre mondiale. Comme les artistes de l’École de Puteaux, Ozenfant veut se démarquer du cubisme de Braque et Picasso. Avec Le Corbusier, ils expliquent leur point de vue dans leur texte « Après le cubisme », écrit en 1918, et dans le magazine L’Esprit Nouveau et dans l’essai « La Peinture moderne », publié en 1925.
Le purisme : doctrine et matière
Finies les constructions complexes du cubisme avec l’infinité de points de vue sur un objet. Place aux formes simples et aux machines à la plastique parfaite (il faut rappeler qu’Ozenfant a étudié l’architecture et s’est passionné pour la mécanique au point de redessiner l’Hispano-Suiza grand sport modèle en Hispano-Alphonse XIII grâce au soutien du roi d’Espagne). Ozenfant considère qu’il faut créer la « grammaire générale de la sensibilité de l’homme moderne », c’est-à-dire inventer un système de composition organisé en schémas orthogonaux et réalisé suivant une manière stricte et contrôlée.
« Le tableau est comme une machine. Le tableau est un dispositif à émouvoir ».
Le purisme s’attache donc à la représentation des objets de la vie quotidienne (bouteille, verre, livre, guitare) mais ceux-ci sont simplifiés et affichent des contours précis qui s’emboîtent les uns dans les autres, puis glissent les uns sous les autres jusqu’à rendre difficile la lisibilité. La composition est stable, frontale, inspirée des dessins d’architecture et du dessin industriel. Les couleurs sourdes sont posées en aplats et l’artiste efface tout trait de pinceau pour neutraliser les effets gestuels. Le purisme se développe de 1918 à 1925.
L’esprit nouveau dans tous les domaines
Sous la bannière du purisme, on peut placer différentes créations : de la peinture (Le Chauffeur nègre de Fernand Léger de 1919, même si Léger n’est pas explicitement puriste), de l’architecture (la villa-atelier d’Ozenfant construite par Le Corbusier et son cousin Pierre Jeanneret au 53, avenue Reille, dans le XIVe arrondissement à Paris), de la photographie(Compositions abstraites de Florence Henri de 1927) et du design (le fauteuil pivotant B302 de Charlotte Perriand de 1927). On peut même rapprocher de cette esthétique sérieuse et sévère les créations de Willi Baumeister et d’Oscar Schlemmer, réalisées dans le cadre du Bauhaus en Allemagne, ou celles des artistes précisionnistes américains comme Charles Demuth ou Charles Sheeler.
Portrait de femme, nature morte ou mise en abyme ?
Le pastel de Le Corbusier, présenté par la galerie Zlotowski, représente une femme debout, tête de trois quarts, vue partiellement en plongée. Devant elle, une table est dressée avec un verre, une fourchette, un bout de ficelle et une bouteille, tous clairement identifiables. Certains objets, comme la bouteille, sont plus grands que nature. La femme et la nature morte sont placées devant un décor constitué aux deux tiers par un sol de couleur sable, le restant étant occupé par un bord de mer avec rochers, eau et bateau (la coque de celui-ci est d’ailleurs étrangement constituée du col de la sorte de carafe posée à gauche de la table). Tous les plans sont rabattus pour former une sorte de papier peint en deux dimensions.
« Ce dessin est très intéressant, assure Yves Zlotowski, car il mêle une composition puriste d’objets (typique de Le Corbusier des années 1920) et un nu féminin (son sujet favori dans les années 1930, après le purisme et sa rupture avec Ozenfant). Bref, un dessin de transition entre un Le Corbusier rigoureux et inventeur d’une doctrine et un Le Corbusier plus hédoniste et sensible ». Son prix est de 105 000 euros.
Reste, pour moi, une énigme : qu’est donc l’éclisse posée sous la table ? On dirait un papillon métallique pour régler la hauteur d’un chevalet. Si tel est le cas, ce dessin d’une Femme et nature morte se transforme en la représentation d’un tableau placé sur un chevalet.
Femme et Nature morte de Le Corbusier est estimé 105 000 euros et proposé à la vente par la galerie Zlotowski.
Contact : info@galeriezlotowski.fr
Guy Boyer
Rédacteur en chef de Connaissance des Arts
Apprenez-en davantage avec l'article "Nouveau regard sur Le Corbusier"